Beauté pèlerine
J'ai eu le bonheur immense de réaliser un rêve de jeunesse en pérégrinant outre-mer au pays des mes ancêtres français, dans un pèlerinage tout-confort ordonné à la prédestination de la grâce et organisé par des personnes riches de dons dans tous les sens du mot.
Mes attentes ne furent pas déçues. Que de beautés et de richesses qui témoignent du
rayonnement culturel, spirituel, missionnaire d'une France garante de l'Évangile et de ses promesses et de ses dons! Mes compagnons de voyage me trouvaient peu communicatifs, occupé que j'étais à développer d'une façon analogique et poétique dans la chambre noire de mon cerveau les impressions durables et profondes qui prendraient visage au grand jour. Avant de tomber dans l'obsolescence complète au pays de l'instantanéité numérique, je livre donc au lecteur virtuel une tranche d'écrit visuel. Comme un acte d'espérance!
HALTE-LÀ
Passant du rêve à la réalité
Au pays de mes ancêtres
Je m'en suis allé
Fortuné de deux compagnons
Mieux aiguillés que moi
Pour la bonne direction
Et la ronde des rond-points
Grâce au GPS qui opère
Pour donner les repères
Du ciel à la terre
Comme une bénédiction
Du Saint-Père urbi et orbi
Aux quatre coins cardinaux
De l'orbe planétaire
Donnant ainsi au pèlerin
Le sûr moyen de se retrouver
Dans le droit chemin après
Des détours incontournables
Déchargé de la tâche multiple
De tenir le volant d'une main
De l'autre le bras de transmission
Et de suivre le menu à la carte
Voici la beauté qui s’imprime
Dans l'âme étonnée
Voilà la beauté qui s'exprime
Par des ho! par des ha!
Dans ce parcours motorisé
Que rien ne lasse aux joies
De la diversité et de la splendeur
Qui s'offre à l'oeil ravi
D'un tel bonheur
De ce paysage rieur
Où le travail séculaire
N'a rien laissé au hasard
Pour l'âme besogneuse
De la France profonde
Naît aussi la fête féconde
Des vignes vivrières
Des alliances nécessaires
Des confidences discrètes
Des mariages qu'on espère
À mesure qu’avance
Cette soirée joyeuse
Et paisible à la fois
Le bon sens paysan
S'inquiète de l’excès
Et du déraisonnable
La fête se clôt
Dans la nuit vespérale
Un silence monacal
Invite au bercail
La sagesse commande
La planche horizontale
Avant que le coq ne chante
Le lever matinal
À qui planche à la dure
Pour le cep qui mature
Au soleil qui veille
À la grappe mûre
Pour l'agape qui recrée
Et donne à l’amour
Fraîcheur et résilience
À toute beauté
Dans le moindre recoin
On ne peut s’arrêter
Hélas il faut choisir
Mais non pas en vain
Car se dessine en forêt
Des sentiers balisés
Chassant la vipère
Et autres compères
Indésirables aux humains
La Providence en met
Plein la vue de l’improbable
Spectacle du roc impavide
Tranché au couperet
D'une taille gigantesque
Coupe radicale
Effaçant toute face
À la tête une entaille
Étrange blessure
Coule une ondée
Harmonieuse et limpide
Comme un saut d’ange
Dans le vide
D'un débit presque rond et
Gros comme un boyau
Perçé et délaissé
D'un céleste pompier
Heureux de sa sieste
Qui dure pour toujours
Surgit comme un émoi
De cette grâce inattendue
Jaillie d'une source
Qu'on ne voit pas
Et se lisse à la paroi
D'un filet tendu
De haut en bas
Mais libre toujours
Comme en détente
La trajectoire se termine
En fine bruine
Pour le boisé avide
D'eau et de verdeur
La curiosité l'emporte
Sur le possible durillon
Et la sente descendante
Qu'il faudra bien remonter
C'est le prix à payer
D'un spectacle gratuit
Sitôt engagé de quelques pas
Déjà l'interdit se brandit
D'une pancarte qui donne
L'avis du danger d’approcher
De l'espace sacré
Sous peine d’éboulis
Qu'on peut à peine deviner
Du monolithique rocher
Guerrier redoutable
Qu'un dieu seul pourrait
Défier et déranger
De son assise invulnérable
Mais l'orgueil humain
N'ayant d'égal que son aveuglement
Se plaît à l'idée d'un duel insensé
Où la mort se repaît
De toute sépulture
Au défi frondeur
Et téméraire
D'une telle imposture
Devant cette injure
Le guerrier redoutable
Pour toute parade
En perd sa façade
Son casque
Sa cuirasse
Son bouclier
À tombeau ouvert
Sous le poids de la masse
Le frondeur meurt
Comme un souffle qui passe
Pour stèle funéraire
Un amas de pierre
Sans éponyme
Et sans épitaphe
Le guerrier redoutable
Met à nu sa nature
Première la douleur
Imparable d'un père
Pour le fils tant aimé
Qui s'exclut à jamais
De la joie d'être aimé
On pourrait croire
Que ce drame imaginaire
Tout de pièce inventé
N'a qu'une portée littéraire
D'une senteur cornélienne
À la sauce sans rime
D'un goût douteux et moderne
Sans ponctuation aucune
Fruit de l'ignorance des lois
Qui donne au lecteur le répit
Une respiration de bon aloi
Quoi qu'il en soit de cette querelle
Opposant les anciens aux modernes
Le fond de la question étant
Que la raison souveraine évacue
Le sens au lieu de lui donner raison
Que l'âme dépouillée de son horizon
Se perd dans le dédale sans fin
Du conjectural menant à l’angoisse
Niant toute fin et tout désir d'y tendre
Car l'angoisse et l'absurde sont
Les vertus capitales du chaos
Sans Dieu ni maître ni état
Sans foi ni loi ni surmoi
Mais le triomphe du ça
Éros et thanatos s’embrassant
D'une étreinte mortelle
L'instinct porté aux nues
De puissance et jouissance
L'un annulant l'autre
D'un néant éternel
Victime d'une emprise onirique
D'une portée symbolique
Non-négligeable
Où la réalité dépasse
La fiction au grand dam
D'une pensée raisonneuse
Et réductrice
Me voilà entraîné
Par mes deux compagnons
L'un pris par une fièvre photographique
L'autre éprise d'un inconnu prometteur
La surprise vient à l'instant qu'on attend pas
C'est un truisme de le dire
Le sentier s'arrête presque là
Quelques mètres plus loin
Au bas de la pente
Un étang s'arrime à la rive
Pour nous voir arriver
Pris de court
D'un si bref parcours
Un spectacle étonnant
Nous invite à la pause
L'eau s'étend dans son lit
Vert éco insoluble au badaud
Mais soluble au chimiste
Éperdu des liaisons
Solides et liquides
De l'eau minérale
En termes résolubles
Pour un esprit résolu aux couleurs
De la résolution fine
Du plaisir de la rétine
Dans le zoom inspecteur
D'aventure nous sommes pris
Au jeu de la contemplation
D'une beauté peu commune
Impossible à fuir
Un peu plus en amont
Un barrage minuscule
Fait de pierres et branchages
Circonstanciées
Porte une plainte
Une musique sur mesure
D'une feinte colère
À qui sort de l'enceinte
On peut imaginer
Des petits gamins harnachant
L'obstacle d'une naïve fierté
Et donne aux rapides
Miniaturisés
Un air de vie de gaieté
À trop de lenteur
À trop de langueur
À peine peut-on deviner
Dans le bois enchevêtré
La chevelure vivante
Et détressée de Madeleine
Ou encore la fontaine scellée
Dévoilant la grâce
Qui s'épanche de tendresse
Au flot de joie ou de détresse
Et s'alarme de l'enfance
En péril ou en exil
D'une terre en guerre
Avec Son Fils-Dieu
Et plante dans le coeur
Du prochain et du lointain
Le dard venimeux de la haine
De la vengeance et de la mort
De l'engeance qui s’exaspère
De la Croix qui récupère
Le triomphe du pardon
Et du Fils et de sa Mère
Dans l'Esprit qui les unit
Pour, la Gloire du Père